La deuxième partie de notre série sur la réfrigération-service présente une analyse détaillée de ce marché au Canada.
La deuxième partie de notre série traite du marché de la réfrigération-service au Canada.
RÉFRIGÉRATION-SERVICE : LE CANADA EST-IL PRÊT?
La demande de réfrigération devrait tripler d’ici 2050 et atteindre 30 % de la consommation mondiale d’électricité. Les marchés et les populations mondiales seront alors confrontés à une pression croissante pour trouver des solutions de refroidissement plus efficaces, durables et à long terme. Par ailleurs, les conséquences du refroidissement sur le climat sont désastreuses parce que les émissions liées à la consommation d’énergie et les fluides frigorigènes à fort potentiel de réchauffement climatique (PRC) contribuent largement à la crise climatique mondiale. Nous estimons qu’un effort coordonné à l’échelle planétaire en faveur d’un refroidissement écoénergétique pourrait éviter jusqu’à 460 milliards de tonnes d’émissions de gaz à effet de serre au cours des 40 prochaines années. La réfrigération-service est l’un des moyens de répondre à la demande croissante de refroidissement ainsi qu’au besoin de trouver des solutions plus écoénergétiques. Dans cette série en trois parties, Julian Burger, diplômé en ingénierie de l’Université Queens, explique la conception de ce modèle, son fonctionnement et les avantages potentiels de son utilisation en Amérique du Nord et au-delà.
APERÇU DU MARCHÉ DE LA RÉFRIGÉRATION-SERVICE
La réfrigération-service en est aujourd’hui à ses balbutiements et se trouve en phase de prototypage visant à confirmer l’efficacité du modèle, de publication d’exemples de succès et des résultats encourageants, et de sensibilisation mondiale. Le Global Innovation Lab for Climate Finance (The Lab), une initiative public-privé qui vise à proposer de nouvelles idées d’investissement durable, a analysé le modèle de réfrigération-service avant de le cautionner en 2019. Dans le cadre de cette analyse, The Lab a cerné quatre critères principaux pour déterminer les pays cibles idéaux pour le pilotage de la réfrigération-service, à savoir la mobilisation internationale, la planification nationale, les tarifs et incidences énergétiques locaux, ainsi que l’offre et la demande de réfrigération. Sur la base de ces critères, The Lab a choisi dix pays cibles : Mexique, Brésil, Malaisie, Chine, Thaïlande, Nigeria, Afrique du Sud, Sénégal, Ghana et Bangladesh. Des projets pilotes ou de « démonstration » ont été déployés dans douze pays, au sein de trois secteurs, comme indiqué ci-dessous.
Figure 1 : Projets actuels de démonstration de la réfrigération-service dans le monde (BASE, K-CEP)
Ces projets de démonstration représentent les premières mises en œuvre du modèle et sont actuellement utilisés par la CaaS Initiative comme exemples concrets en vue de susciter l’adoption du modèle dans le monde entier. D’un système de climatisation résidentiel à grande échelle en Colombie, aux systèmes de refroidissement d’un centre de données à Singapour, la réfrigération-service a prouvé sa polyvalence, et ce, dans de nombreux secteurs de la sphère de la réfrigération.
Dans chacun de ces projets pilotes, la CaaS Initiative s’est associée à une entreprise de réfrigération (le plus souvent une entreprise du pays dans lequel le projet a lieu) et à un partenaire financier pour établir un contrat. La majorité des projets ne sont opérationnels que depuis 2018 ou ultérieurement, certains projets étant antérieurs à la création de la CaaS Initiative.
POURQUOI LA RÉFRIGÉRATION-SERVICE N’A-T-ELLE PAS ÉTÉ ADOPTÉE AU CANADA?
La réfrigération-service est un modèle si nouveau que les projets pilotes qui ont vu le jour ont été directement soutenus par la CaaS Initiative dans la planification et l’exécution des contrats. Ce groupe a mis au point des modèles financiers, des modèles de contrats et autres ressources pour aider les entreprises à proposer des solutions de réfrigération-service. Il a aussi collaboré avec les entreprises de réfrigération et les clients pour assurer le succès quasi immédiat du modèle.
Du fait de la nature philanthropique des fonds qu’ils reçoivent, les organismes sans but lucratif à la tête de la CaaS Alliance sont limités sur le plan géographique dans leur appui direct aux projets de réfrigération-service. Le collectif BASE ne peut contribuer directement à la mise en œuvre du modèle de réfrigération-service que dans les pays admissibles à l’aide publique au développement (APD), conformément à leur statut de partenaires auprès des Nations Unies. À ce titre, les pays développés comme le Canada et les États-Unis n’ont ni bénéficié de l’appui direct de la CaaS Initiative ni encore tiré parti de la mise en œuvre de ce type de projet. De plus, il est attendu que la demande de refroidissement des pays en développement monte en flèche au cours des 30 prochaines années, bien plus que celle du Canada. Il est donc essentiel que des modèles écoénergétiques de réfrigération-service soient d’abord adoptés dans ces pays pour garantir que l’accès à un refroidissement abordable et durable soit respecté là où il sera le plus nécessaire.
Il n’en demeure pas moins que l’intérêt ou la perspective pour la CaaS Initiative en Amérique du Nord ou en Europe n’en sont pas moins diminués, les entreprises de réfrigération ayant exprimé leur intérêt à recevoir une aide plus indirecte en intégrant la CaaS Alliance mondiale. BASE entrevoit un très fort potentiel de succès au Canada en raison du marché plus adaptable et ouvert que dans les pays en développement. Les bailleurs de fonds et les fournisseurs de services de réfrigération canadiens chercheront à assurer le succès des premiers projets de réfrigération-service à l’étranger et s’appuieront sur des études de cas pour bien comprendre le modèle et ses avantages avant de lancer leurs propres projets pilotes.
QUELS SONT LES OBSTACLES À L’ADOPTION DE LA RÉFRIGÉRATION-SERVICE AU CANADA?
En plus d’en être à ses balbutiements, la réfrigération-service fait face à d’autres obstacles empêchant son adoption au Canada. En effet, trois principaux obstacles ont été soulignés par The Lab lors de l’examen des défis auxquels cette initiative est confrontée.
Le premier consiste à trouver des partenaires compétents pour la mise en œuvre. Il s’agit non seulement des fournisseurs de refroidissement souhaitant proposer la solution de réfrigération-service, mais aussi des bons clients et bailleurs de fonds acceptant d’être les premiers à adopter ce modèle. Cet obstacle peut être atténué si l’on met l’accent sur ceux qui ont des antécédents en matière de développement durable et d’innovation. Les partenaires qui sont prêts à s’adapter et qui voient une valeur dans les avantages durables, financiers et opérationnels d’un projet de réfrigération-service sont plus enclins à en être les premiers adeptes. BASE estime qu’à mesure que ces partenaires lancent de tels projets, des entreprises moins présentes dans le domaine de l’innovation en reconnaîtront le succès et seront prêtes à adopter ce modèle.
Le deuxième obstacle s’articule autour des fournisseurs de refroidissement qui doivent s’apprêter à apporter des changements internes à leurs processus opérationnels pour passer de l’état de vendeur de systèmes de refroidissement à celui de fournisseur de services. Ils pourront devoir modifier les indicateurs chiffrés de mesure du succès et la stratégie globale de l’entreprise de manière à ne pas rendre compte des ventes réalisées uniquement. Cet obstacle peut être difficile à contourner, en particulier pour les grandes entreprises de refroidissement qui ont déjà mis en place des systèmes opérationnels et auront besoin de plus de temps pour s’adapter au concept de fourniture de services. The Lab croit que ce coup de barre pour les entreprises de refroidissement peut être atténué si la CaaS Initiative leur propose des ressources, comme des modèles financiers, des conseils de structuration, des contrats types et l’accès au réseau de CaaS Alliance aux fins de l’échange des apprentissages clés et des pratiques exemplaires.
Le troisième obstacle possible est le fait de travailler avec des marchés porteurs difficiles, comme un faible accès à des liquidités et un taux élevé de défaut de paiement des clients. Ces obstacles sont moins préoccupants dans le cas d’un marché comme le Canada qui dispose de plus de liquidités que les marchés dans lesquels les projets de démonstration sont entrepris actuellement, et à ce titre, poseraien moins un problème à la mise en œuvre au Canada. Autre obstacle potentiel : The Lab a souligné les prix élevés/fluctuants de l’électricité qui, dans le cas du modèle de réfrigération-service, dictent les frais mensuels facturés à un client et doivent donc être pris en compte lors de la conclusion des contrats.
À QUOI RESSEMBLE L’ADOPTION PRÉCOCE DE LA CAAS INITIATIVE AU CANADA?
Compte tenu du marché de la réfrigération-service actuel et une fois les obstacles à son adoption levés, divers adeptes précoces pourraient former le marché canadien au cours des cinq à dix prochaines années. Le secteur primaire qui connaîtrait très probablement une mise en œuvre précoce est celui des solutions de réfrigération industrielle à moyenne et grande échelle, du fait que les grands projets affichent les gains les plus élevés pour ce qui est des économies de coûts et de réduction des émissions. À ce jour, le secteur industriel est le plus testé dans les projets actuels de démonstration de la réfrigération-service.
Les petites entreprises gagneraient fortement à éviter des dépenses en capital, mais, confrontées à un risque plus élevé de défaut de paiement, elles attireraient moins les fournisseurs de refroidissement et les bailleurs de fonds à la recherche des premiers adeptes souhaitant conclure des contrats supérieurs à dix ans. De plus, les grandes entreprises profiteraient davantage de la surveillance opérationnelle réduite d’un projet de réfrigération-service et de la capacité d’optimiser et cibler leurs activités en cours. Les plus grandes multinationales, comme Dr. Oetker, qui entreprennent actuellement un projet de réfrigération-service en Afrique du Sud, pourraient également être intéressées à utiliser le modèle dans d’autres pays, comme le Canada. Il est probable que les entreprises qui ont des relations avec des fournisseurs de réfrigération et qui cherchent à investir dans une nouvelle installation ou à moderniser une installation existante seront intéressées par le modèle de réfrigération-service. Les grandes entreprises ont également commencé à mettre en place des mesures de durabilité plus strictes, la carboneutralité gagnant en popularité; un projet de réfrigération-service pourrait démontrer un engagement envers la sobriété énergétique et la réduction des émissions.
En conclusion, il est probable que les premiers à adopter de la réfrigération-service au Canada soient les moyennes et grandes entreprises qui cherchent à récolter les avantages financiers, opérationnels et environnementaux d’une solution de réfrigération-service. Les entreprises qui ont la bonne taille, possèdent déjà des systèmes de réfrigération en voie d’obsolescence, valorisent l’innovation et souhaitent démontrer leur responsabilité sociétale seraient les clients idéaux d’une solution de réfrigération-service. D’autres marchés potentiels à développer, comme l’entreposage frigorifique résidentiel et commercial, ainsi que les clients plus petits, sont tous des cibles viables du modèle de réfrigération-service et suivraient le mouvement si le succès pouvait être démontré dans le créneau des grandes entreprises.
Lire le premier épisode de cette série : La réfrigération-service, un nouveau modèle d’affaires pour une réfrigération durable.
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